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JOURNAL  SUD  OUEST  04 NOVEMBRE 2004

-- Cadijo sort un nouvel album inspiré du zydeko louisianais. Il trouve ses racines dans le marais, comme au bord du Mississippi

L'harmoniciste du marais

: Guy Lacquement



Jean-Pierre Carraro, alias Cadijo
PHOTO GUY LACQUEMENT

« J'ai vécu à Saint-Vincent entre les deux ponts Eiffel. J'ai passé des journées entières sur le ponton. A regarder l'eau qui coule là depuis des milliers d'années, on relativise ses problèmes. J'y retourne m'y baigner. La Dordogne est très propre. Une fois, par temps calme, j'ai aperçu le fond. Quand je suis dans l'eau, je m'imprègne des odeurs d'herbe et de terre » : Cadijo parle des choses simples avec des mots simples.
« Je suis bien à Ambarès; c'est un peu le Mississippi : deux rivières et les marais. Je me promène sur le bord de la Garonne pour humer les odeurs marines qui remontent avec le mascaret. Cela m'a inspiré un morceau où je compare la rivière à une femme. Depuis j'ai appris que, chez les Dogons, la rivière est une déesse mère. »
L'harmoniciste de blues demeure quartier Saint-Denis, près des circassiens. « La personne juste à côté est un funambule. Comme nous répétions entre musiciens, il est venu jouer de sa trompette. Il a interprété tout Django Reinhardt, il connaissait les airs à l'oreille... Nous parlions de nos métiers et il a conclu "finalement, tu es comme nous. Un jour par-ci, un jour par là..." »
Natif de Castelsarrazin, sa terre promise, Jean-Pierre Carraro quitte le Tarn-et-Garonne à 6 ans, avec sa famille, pour les Ardennes, l'Aube et finalement la Gironde. « Ambarès, c'est un hasard qui me va bien... »


« Ce sera ça ». « Au rugby, on nous appelait les trois frères "Cadijo", personne n'a jamais su pourquoi, ça m'est resté. »
A 17 ans, l'Ambarésien entend un grand harmoniciste de jazz. C'est son chemin de Damas : « Si je joue, ce sera ça ! » Il se procure une célèbre méthode, prend son souffle et imite tous les disques recommandés par ce maître. Rapidement il se libère de l'imitation : « J'écoutais un passage puis je me demandais ce que cela me faisait. Puis je jouais jusqu'à obtenir la même sensation... »
Un disquaire remarque son assiduité et le traîne au Jimmy's de Bordeaux. Là, la vedette l'oblige à l'accompagner. : « Je suis monté sur scène comme un automate. J'avais un voile noir devant les yeux ». L'essai est concluant, il est invité de plus en plus souvent jusqu'à suivre son mentor en tournée.
« Je ne voulais pas courir le cachet ! » Un temps, il sera Jean-Pierre Carraro, éducateur sportif en haltérophilie quinze heures par semaine et Cadijo, l'harmoniciste de blues le week-end. Ca ne pouvait pas durer. Cette double vie lui interdisait les tournées et les festivals lointains. Il laisse tomber la fonte pour la scène.


Trois notes. « C'est à partir d'une sensation que les mots viennent. Des fois, une phrase avec son propre rythme. D'autres fois, c'est trois notes. Elles peuvent rester sans suite ou rencontrer un texte... Je n'impose pas des créations toutes faites. Au cours des répétitions, chacun l'éclaire de sa propre personnalité. J'incite ceux qui m'accompagnent à apporter leur souffle personnel ».
C'est avec des guitaristes de Pau et d'Anglet qu'il marie blues et swing manouche : « Je ne veux pas céder à une mode... » Ces musiciens empruntent des passerelles entre ragtime et pompe manouche déjà explorées par des devanciers américains. Maintenant, Cadijo s'appuie sur trois pôles : des standards de swing manouche en quartette, des vieux ragtimes en duo, ses compositions personnelles sur des textes en français à la voix et à l'harmonica.
On peut l'entendre partout dans le Sud-Ouest : à Bordeaux, au Satin doll, au Blueberry (rue Camille-Sauvageot le 25 novembre prochain), au Congo café (le 27), au Coneymara pub, chez Alriq...

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